En 1987, Absalon remplit la pièce d'un appartement avec des formes carrées et rectangulaires. Le décor de celui-ci est parfois malmené ; et l'on perçoit plus dans le désordre que des objets peints de différentes couleurs. Les nouveaux arrangements, véritables propositions formelles qu'esquisse l'artiste, créent un étrange amalgame. Le caractère sentimental — et d'un usage personnel — des objets ayant appartenu aux propriétaires du lieu n'apparaît plus. Ce qui compte désormais, c'est un empilement désordonné mais savamment calculé. Les objets eux-mêmes sont nés à d'autres fins.
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"Mon travail, précise Absalon, consiste à ranger des objets et à leur donner des formes idéales pour que ceci soit possible. De là, la simplicité de ce que je fais et qui me permet de créer un ordre homogène. Contrairement à un architecte ou à un designer, ma réflexion est totalement libre de contrainte".
Le réel ne l'intéresse pas ; il est hors d'atteinte. La fonction des objets n'est pas mise en valeur car elle est interchangeable. "Pour chaque objet, déclare Absalon, il y a un choix au départ qui est totalement subjectif… Rien n'oblige qu'un siège ressemble à un siège, c'est totalement la décision d'une culture, d'une logique subjective".
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Dans les Propositions d'objets quotidiens, des formes abstraites qui représentent des objets font penser aux réalisations des Néoplasticiens dans leur souci des rapports géométriques et des contrastes lumineux. De même, chez Absalon, l'image du Bauhaus, les objets, les plans et la maison sont le résultat d'une certaine synthèse des arts ; ne déclare-t-il pas : "je pense que mon travail a à voir avec le Bauhaus, qui voulait changer le monde en créant de nouveaux espaces, en imaginant une nouvelle façon d'habiter. Cette organisation géométrique est pour moi la base de la création".
Aussi les objets conçus par Absalon sont-ils représentés par des formes abstraites, géométriques : une table prend l'aspect d'une surface à trois dimensions, tandis qu'un fauteuil se mue en volume circulaire. La fonction est mise entre parenthèses, pour tirer partie pleinement de la forme. "La forme et l'usage, affirme Absalon, sont indépendants, l'objet est choisi dans un vocabulaire de formes. Celles-ci se promènent d'une utilité à l'autre…"
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Son travail, tourné vers le monde contemporain, est parfois décalé dans le temps. La vitrine qu'il compose au Musée archéologique de Poitiers (Propositions d'objets quotidiens, 1990), se trouve dans une très grande proximité avec des objets antiques. Comme si dans une volonté de continuité, il mettait au même niveau de reconnaissance son travail et ces reliques savamment répertoriées. "L'objet, répète-t-il, est choisi pour ses qualités esthétiques… L'archéologie, comme le design, nous propose un inventaire de formes qui nous permet d'établir d'autres liens entre les formes et leur utilité pour construire une culture".
Peu importe le style, seule importe la forme des objets et leur traitement. La forme permet une avancée pour faire de nouvelles créations.
Dans le même musée, un autre type de Propositions d'habitation (1990) apparaît doté d'un mobilier imposant qui occupe toute la surface. Véritable dictionnaire de formes, cette œuvre assigne au corps une place particulière et conditionne de nouvelles habitudes.
Jean-Pierre Bordaz, "Le Monde tel qu'il doit être", in Absalon, Paris, édition de l'Association Française d'Action Artistique — Ministère des Affaires Étrangères, 1992.