En imaginant qu'il faut un jour idéologiquement possible de définir la vie des femmes par la distinction entre les domaines privés et publics — ce que suggèrent les images d'une vie divisée entre l'usine et la maison pour la classe laborieuse, entre le marché et la maison pour la bourgeoise, et entre le personnel et le politique selon le genre — une telle idéologie est maintenant totalement fallacieuse, et elle ne réussit même pas à montrer comment chaque terme de ces dichotomies construit l'autre en pratique et en théorie. Je lui préfère l'image idéologique du réseau, qui suggère une profusion d'espaces et d'identités, et une perméabilité des frontières du corps personnel et du corps politique. Le "travail en réseau" est à la fois une pratique féministe et une stratégie de compagnie multinationale : l'opposition cyborgienne tisse la toile.
Donna Haraway, "Manifeste cyborg : science, technologie et féminisme socialiste à la fin du XXe siècle" in Manifeste cyborg et autres essais, trad. Marie-Hélène Dumas, Charlotte Gould et Nathalie Magnan, Paris, Exils éditeur, 2007, p. 63.