Plus explicite encore, l'exposition Machine Art (1934), organisée par Philippe Johnson au MOMA de New York, fait valoir la sublime beauté des fonctionnements. Johnson place côte à côte les instruments et outils de la vie ordinaire : équipements industriels, domestiques, de bureau, instruments scientifiques et de laboratoire… qui incarnent la jeune esthétique moderniste : "Heureusement la beauté fonctionnelle de la plupart des objets présentés n'est pas obscure et de toute façon, dans cette exposition, l'appréciation de leur beauté dans le sens platonique est plus importante." Les hélices, ressorts, instruments dentaires, machines à rayons X et autres objets mobiliers sont agencés de la même manière que sont les œuvres de maîtres dans les grands musées. Ils reprennent les codes de la monstration définis pour les œuvres d'art en étant dotés de socles, vitrines, etc. Jusqu'à la représentation sur la couverture du catalogue de l'exposition d'une photographie noir et blanc du roulement à billes SKF, présenté sans indication d'échelle, ce qui montre à quelle hauteur les commissaires de l'exposition, à la différence du streamline, placent la beauté matérielle et technique dans le bon fonctionnement des objets.

Alexandra Midal, Design, introduction à l'histoire d'une discipline, 2009, Paris, Pocket Univers Poche, p. 97.