Ce lieu obsessif — cet espace rendu émotionnel — est, je crois, l'élément-clé de toute sculpture construite selon son échelle spécifique (tous les objets d'artistes ne sont pas de la sculpture, loin de là). Car l'échelle sculpturale n'est pas simplement la relation d'un objet d'art à un objet voisin — le corps humain, l'architecture ou un accident de terrain quelconque. C'est plutôt la mesure d'une relation unique et farouchement émotionnelle entre un objet placé et l'espace environnant, une relation assez farouche pour souder l'objet et l'espace en une seule chose-lieu sculpturale. Une chose comme un lieu, dont la réalité émotionnelle est totalement façonnée par l'objet placé, un lieu créé dans son entière nouveauté.
Richard Nonas, Get Out, Stay Away, Come Back, À propos de la sculpture et de la sculpture en œuvre, trad. Mathilde Bellaigue, Dijon, Les Presses du Réel ; Chalon-sur-Saône, La vie des formes, 1995, p. 71.