ce n'est pas seulement le temps qui a
ravagé Ellis Island,
ni l'humidité, ni le sel,
mais les pillages :
pendant près de vingt ans, l'îlot, désaffecté, à peine
gardé, a été systématiquement mis à sac par des
revendeurs de ferraille qui venaient y chercher des
matériaux d'année en année plus précieux :
le cuivre des robinetteries,
le laiton des boutons de porte,
le zinc des toitures,
le plomb des canalisations,
le fer forgé des rampes d'escaliers,
le bronze des lampadaires et des lustres,
tout ce qu'ils pouvaient emporter sur leurs barques, laissant pourrir sur place des monceaux de meubles,
des piles de matelas et des sommiers rouillés, des
amoncellements d'oreillers crevés
Georges Perec, Ellis Island, Paris, P.O.L, 1995, p. 55.