La mise en évidence de la toxicité de certains pigments et de leur usage possible comme psychotropes conduit à réorienter l'enquête : au-delà des images reproduites, ce sont les pratiques auxquelles elles donnent lieu qui sont désormais interrogées. L'image apparaît alors comme le résultat de performances magiques ou rituelles, le support du mythe, de la parole et du chant, la conséquence de gestes effectués sous la transe. En prouvant aussi la rapidité d'exécution des figures, l'expérimentation rend pensables des "performances" rituelles effectuées à l'occasion de la production de ces images, et à travers elles. La technique de réalisation des figures se charge de sens : apposer ses mains enduites de colorant sur la paroi, sont des actes, des gestes, avant même d'être des volontés de représenter, de donner à voir. Indépendamment de sa fonction esthétique ou de représentation, l'image est alors lue comme trace : "Dans certains cas, l'image a pu être la trace durable de processus qui étaient aussi importants ou plus importants que les résultats", écrit Lorblanchet[1].

Claudine Cohen, La méthode de Zadig, La trace, le fossile, la preuve, Paris, éditions du Seuil, 2011, p. 273.

[1] Michel Lorblanchet, Les Grottes ornées de la préhistoire. Nouveaux regards, Paris, Errance, 1995 p. 233.