Plusieurs points expliquent et complètent cette définition générale :
1. Le care n'est pas restreint à l'interaction avec autrui, il existe aussi pour des objets, pour l'environnement.
2. On ne suppose pas le care individualiste ni dyadique. Le paradigme du bon care dans la pensée de Tronto n'est pas celui de la relation entre la mère et l'enfant. Elle rappelle, contre une conception occidentale "romantique", que peu de sociétés ont conçu l'éducation des enfants comme dépendant exclusivement de la femme qui leur a donné naissance.
3. L'activité de care est culturelle, et connaîtra selon les cultures des variations ouvertes.
4. C'est une activité dans la durée, qui est de ce fait non seulement une pratique, mais aussi une disposition.
Si cette définition en termes d'activité visant maintien, perpétuation, réparation, permet de clairement distinguer le care d'autres activités — négativement n'est pas en soi care : jouer, réaliser un désir, concevoir, produire et mettre un objet sur le marché, créer une œuvre d'art… —, cela se complexifie très vite : certaines activités peuvent en partie viser le care, en partie autre chose ; et les fins peuvent être emboîtées. Ainsi le jeu peut aussi inclure du care (avec les enfants…), tout comme certaines activités de production (visant in fine des soins…).
Le care est distingué d'autres activités de protection plus communément pensées comme d'ordre politique. Ainsi certaines formes de protection sont manifestement du care — ainsi de certaines activités de police — mais d'autres non, comme en tout cas l'activité militaire au XXe siècle, qui peut sembler vouée au maintien, à la perpétuation, mais en vertu d'une activité tellement destructrice qu'il est difficile de la ranger dans le care. Que dire encore d'une activité de protection qui se multiplie pour sa propre cause ? Un marché autoentretenu de la protection n'est plus du care, répond Tronto, soulignant dans ce cas l'absence d'une orientation vers l'extérieur (autrui, le monde). Elle pense donc ainsi la différence générale entre protection et care : le second demande que les problèmes et besoins d'autrui soient pris comme fondement de l'action. La protection n'est du care que dans cette mesure. De plus, le care implique une forme de processus continu, ce que ne fait pas la protection.

Layla Raïd, Care et politique chez Joan Tronto in Qu'est ce que le care ?, Souci des autres, sensibilité, responsabilité, Pascale Molinier, Sandra Laugier, Patricia Paperman (dir.), Paris, Petite bibliothèque Payot, 2009, p. 74-75.