Les objets culturels sont tous potentiellement candidats à leur patrimonialisation ; l'examen qu'ils doivent passer à cette fin, et qui en multipliera les effets, est subordonné à une condition d'aura préalable. Cette possibilité — "cette opportunité", comme on dirait certainement — ne répond à aucune condition naturelle ; elle dépend de mille facteurs, et elle irrigue de façon différenciée la totalité de nos cultures. Elle est un facteur de plus-value, sur un plan économique et financier. Dans le "monde de l'art", elle constitue un élément majeur du fonctionnement des musées, des galeries, des expositions et du marché de l'art. La conservation et la restauration, le patrimoine et le souci patrimonial à l'échelle de la planète en sont des chevilles ouvrières entièrement solidaires. L'art donne peut-être ici l'exemple, de façon ostentatoire et discriminante : l'aura lui est essentielle. Il n'y a pas d'art sans aura, mais il s'agit d'un fait qui ne concerne probablement pas le seul marché de l'art : il n'y a peut-être plus de marché sans aura !
Jean-Pierre Cometti, La nouvelle aura, Économies de l'art et de la culture, Paris, Questions théoriques, collection Saggio Casino, 2016, p. 196.