C'est en soufflant l'espace que, dans son œuvre, Parmiggiani met le lieu en mouvement. Qu'est-ce à dire ? D'abord, que la matière visuelle se forme dans le mouvement "soufflé", atmosphérique, exhalé, des particules de combustion émises par le feu de pneus : volutes d'une épaisse fumée qui s'immisce partout et "moule", pour ainsi dire, chaque chose, chaque accident. Le lieu est "soufflé" en tant que produit par un souffle de cendres envahissant l'espace et le reconfigurant par une empreinte aussi subtile qu'elle est obsidionale (rien ne lui échappe). Mais, dans cette opération, l'espace de référence, l'espace des objets reconnaissables est également "soufflé" en tant qu'il est détruit par un souffle : choses salies, noircies, puis définitivement révoquées du site par leur tracement de fumée.

Georges Didi-Huberman, Génie du non-lieu, Air, poussière, empreinte, hantise, Paris, Les Éditions de Minuit, 2001, p. 38.