Tout au long de ce chapitre, le discours raciste est resté axé sur l'hygiène sexuelle, et le scène thérapeutique médicale a été le théâtre de la nature dans la cité de la Science. J'en ai plus qu'assez d'assurer le lien entre la parenté et "la famille", et j'aspire à des modèles de solidarité, d'unité et de diversité humaines enracinées dans l'amitié, le travail, les objectifs partiellement partagés, la souffrance collective sans issue, la mortalité inéluctable et l'espoir qui persiste pourtant. Il est temps de théoriser un inconscient "inconnu", une scène primale différente, où tout ne tire pas son origine des drames de l'identité et de la reproduction. Les liens par le sang — y compris le sang réinjecté dans le monnayage des gènes et de l'information — ont déjà été suffisamment sanglants comme cela. Je crois qu'il n'y aura pas de paix raciale ou sexuelle, pas de nature vivable, si nous n'apprenons pas à produire de l'humanité par le moyen de quelque chose de plus et de moins que la parenté. Je pense que je suis du côté des vampires, ou au moins l'un deux. Mais depuis quand choisit-on le vampire qui hantera vos nuits ?
Donna Haraway, "La race : donneurs universels dans une culture vampirique. Tout est dans la famille : les catégories biologiques de filiation dans les États-Unis du XXe siècle" in Manifeste cyborg et autres essais, trad. Nathalie Magnan, Paris, Exils éditeur, 2007, p. 293.