Un homme, artiste de profession, montrait comment il se rangeait tel un objet domestique au sein de structures blanches, aux dimensions minimales (7 à 9 m2 au plus), aux vides restreints, s'obligeant pour chaque mouvement à épouser les saillies géométriques que constituait un étrange mobilier ; nous apprenions à la lecture d'un court cartel disposé à proximité de l'œuvre, qu'Absalon — comme il se faisait appeler — avait élaboré le projet de se loger ainsi, dans six cellules construites par ses soins et à sa mesure (1 m 90, précisait le texte, soit 15 cm de plus que la moyenne), cellules toutes différentes bien que répondant à un même principe de précarité, de contrainte corporelle, d'économie de place, cellules qu'il prévoyait d'implanter de façon sédentaire au cœur des six villes (Paris, Tel Aviv, Francfort, New York, Zurich et Tokyo) où son travail l'amenait à séjourner. Chacune de ces cellules l'astreignait à réapprendre les gestes du quotidien selon une logique toujours singulière, induite par la forme même de la cellule et de ses agencements intérieurs. Il organisait une existence propre à fabriquer du changement. Ainsi, précisait-il, "j'aime le changement pour le changement, sans y adjoindre la notion de progrès[1]."
Audrey Koulinsky, "La joie dans les coins" in Absalon, cellule516 zone d'art habitée, 2014, éditions Dilecta, p. 5-6.
[1] Tiré de la conférence donnée par Absalon à l'École nationale des beaux-arts de Paris, 1993.