J'ai escaladé les rochers jusqu'au point culminant de l'île. De là-haut, j'ai une vue illimitée qui s'étend dans toutes les directions. Le banc qui se trouve à cet endroit a été construit par mon grand-père. Les soirs d'été quand il faisait chaud, il venait s'asseoir là avec ma grand-mère. Je ne sais pas s'ils parlaient où s'ils restaient silencieux. Mais un jour, quelques années avant leur mort, j'étais encore enfant, je me souviens d'avoir pris des jumelles pour les espionner au loin. J'avais été très étonné de voir qu'ils se tenaient la main.
C'était un geste tout simple, un geste évident de tendresse et de gratitude. Ils avaient été mariés pendant soixante et un ans.
Le banc est vermoulu. Je l'ai mal entretenu, comme tant d'autres choses sur cette île.

Henning Mankell, Les bottes suédoises, trad. Anna Gibson, Paris, Seuil Points, 2016, p. 44-45.