Leur aura est étroitement liée à leur appartenance à l'histoire, en tout cas à un passé plus ou moins lointain, qui leur donne la valeur et le sens particuliers qu'ils présentent à nos yeux, et qu'il s'agit de préserver. Cette situation est en elle-même paradoxale, car elle suppose la préservation dans le présent des marques d'un passé qui par nature n'est plus et ne sera jamais plus. Le fait, en outre, que cette préservation (dans l'acte de conservation comme dans celui de restauration) se concentre sur la matérialité des objets est à la source des principales difficultés auxquelles cette visée doit faire face[1]. Leur caractère unique en constitue évidemment un trait majeur, ainsi que leur régime éventuellement autographique.

Jean-Pierre Cometti, La nouvelle aura, Économies de l'art et de la culture, Paris, Questions théoriques, collection Saggio Casino, 2016, p. 185.

[1] Ces difficultés sont doubles. D'une part, il est clair que l'intervention du restaurateur se fait sur la matière de l'œuvre ou de l'objet, mais c'est pour préserver une dimension de l'œuvre qui n'est évidemment pas matérielle ; d'autre part, l'entrée en force, dans l'art, de matériaux banals, vulgaires, par rapport à ceux qui étaient traditionnellement utilisés, a posé de nouveaux problèmes qui sont au cœur de ceux que pose l'"art contemporain".