L'exposition, c'est-à-dire l'être tel-quel, n'est aucun des prédicats réels (l'être-rouge, chaud, petit, lisse—), mais n'est pas non plus différent d'eux. (Autrement, elle serait quelque chose d'autre qui s'ajouterait au concept d'une chose et, donc, encore un prédicat réel.) Que tu sois exposé n'est pas une de tes qualités — mais n'est pas non plus autre qu'elles (nous pourrions même dire qu'il est non autre que celle-ci). Tandis que les prédicats réels expriment des relations internes au langage, l'exposition est une pure relation avec le langage même, avec son avoir-lieu. Elle est ce qui advient à quelque chose (précisément : l'avoir-lieu de quelque chose) de par sa pure relation au langage, du fait d'être-dite. Une chose est (dite) rouge et, en cela, en tant qu'elle est dite telle et se réfère à soi comme telle (non pas simplement comme rouge), elle est exposée. L'existence comme exposition est l'être-tel d'un quel. (La catégorie de la talité est, en ce sens, la catégorie fondamentale, qui reste impensée dans chaque qualité.)
Giorgio Agamben, La communauté qui vient, Théorie de la singularité quelconque, trad. Marilène Raiola, Paris, Seuil, 1990, p. 106-107.