La catastrophe fut si soudaine que, partout, on retrouve les préparatifs des repas abandonnés ; ici, c'est un cochon de lait qui cuit dans la marmite de bronze, là, chez le boulanger, le pain est encore dans le four. Les habitants vaquaient à leurs occupations habituelles dans les maisons, dans les champs et sur les chantiers. Tout à coup, la vie s'arrêta, on laissa outils et ustensiles : le poing du destin venait de s'abattre sur la cité. Les classes sociales étaient brusquement abolies ; exposés à la même menace, le maître et l'esclave, l'homme et la femme se sentaient tout à coup solidaires. Les bêtes elles aussi furent prises de panique ; tirant sur leur licol, certaines parvinrent à se libérer mais la plupart moururent dans leurs étables ; de tous, les chiens attachés à leur niche, gardiens des maisons, connurent le sort le plus terrible.

Egon C. Corti, Vie, mort et résurrection d'Herculanum et de Pompéi [1963], trad. Henry Daussy, Paris, Petite Bibliothèque Payot, 1995, p. 110.