Dans les recherches et les hypothèses visant à élucider ces traces, se déploie une impressionnante richesse conceptuelle et interprétative. Les paléo-ichnologues sont-ils les Sherlock Holmes des temps modernes ? C'est peu de dire que leur enquête rejoint celle du détective ; car les "coupables" recherchés ne sont pas des êtres semblables à nous, doués de sens et d'intentions : ce sont des êtres inouïs, qui vivaient dans des environnements dont il est presque impossible de connaître aujourd'hui toutes les composantes. C'est alors toute la panoplie conceptuelle d'une science qui se déploie, c'est l'inventivité et l'imagination des chercheurs qui sont requises pour interpréter des "faits" qui se situent à l'extrême limite de l'identifiable, au presque degré zéro de l'indice, à la frontière du rien.
Claudine Cohen, La méthode de Zadig, La trace, le fossile, la preuve, Paris, Seuil, 2011, p. 83.