"J'entends par sculpture ce que l'on obtient en enlevant quelque chose (per forza di levare) ; ce qu'on obtient en ajoutant (per via di porre), c'est-à-dire en modelant, se rapproche de la peinture[1]." Conception déjà familière, puisque Alberti, on s'en souvient, avait établi une distinction similaire entre sculpter et modeler et que, selon la fameuse formule de Léonard, "le sculpteur ôte toujours de la matière du même bloc". Mais jamais avant Michel-Ange la différence entre sculpture et modelage n'avait été définie avec autant de concision et de netteté. Cette formule bien frappée venait d'un homme prestigieux et touchait une question vitale pour les sculpteurs ; il n'est pas étonnant qu'elle ait marqué la façon de penser la sculpture jusqu'au XXe siècle.
Rudolf Wittkower, Qu'est-ce que la sculpture ? [1977], trad. Béatrice Bonne, Paris, Macula, 1995, p. 133.
[1] Traduction de J-C Lebensztejn, Avant-guerre, n°2, Saint-Étienne, 1er trimestre 1981, p. 56. Voir aussi L. Fallay d'Este (éd.), Le paragone, le Parallèle des arts, Paris, Klincksieck, 1992.