Mais quelles que soient les images que l'on découvre dans la sculpture de Caro, elles sont dernières, et non premières : la pièce est faite, les images sont là, un point c'est tout. Les images ne participent pas à l'organisation de la pièce, même lorsqu'elles s'imposent fortement à notre conscience. Des sculptures telles que Span et Horizon tirent leur unité d'ensemble non pas des images qu'elles constituent de manière visible, mais des significations qu'elles produisent. Tout se passe comme si les sculptures de Caro traduisaient l'essence même de la signification — comme si la possibilité d'acter la signification de nos paroles et de nos actes était cela seul qui rend sa sculpture possible.

Michael Fried, Chapitre 5 Anthony Caro, in Contre la théâtralité, Du minimalisme à la photographie contemporaine, 1998-2006, trad. Fabienne Durand-Bogaert, Paris, nrf essais Gallimard, 2007, p. 111-112.