Vito regarde ces photos dans la convoitise, dans le tourment, dans la conscience de son malheur, mais le lendemain après-midi il se trouvait assis sur un banc du Jardin des Plantes, non loin du portail principal, en attendant l'individu.
Piranese avait un peu froid, son corps était sec, son profil coupant, ses cheveux noirs brillaient comme une perruque et ses yeux noirs comme sous une fièvre. Assis sur ses reins, sa jambe raide au bout de lui, serrant les poings dans les poches de sa veste hors saison pour encore un petit mois.
Avant celle qu'il était en train de pratiquer sur ce banc, Vito Piranese avait exercé d'autres professions, entraîneur de basket avant son accident puis courtier en métaux non ferreux, prospecteur-placier jusqu'au départ de Martine, retoucheur photographe enfin.
Jean Echenoz, Lac, Paris, Mdouble Les Éditions de Minuit, 1989/2008, p. 15.