Le théoricien productiviste Boris Arvatov était de ceux-là, qui avait contesté dès 1926 cette idée d'une pureté suprême que Gabo essayait de relancer dans les années cinquante :
"Alors que la technologie capitaliste tout entière s'appuie sur les réussites les plus grandes et les plus récentes, et qu'elle sert la production de masse (industrie, radio, transports, presse, laboratoires scientifiques), l'art bourgeois est, en principe, resté au stade de l'artisanat. Il s'est donc isolé de plus en plus de la réalité sociale et collective pour entrer dans le domaine de l'esthétique pure […] Le maître solitaire, seul exemple de spécialiste de l'"art pur" dans la société capitaliste, peut se tenir à l'écart d'une pratique immédiatement utilitaire parce qu'il n'utilise pas les techniques mécanisées. De là viennent l'illusion totale de l'absence d'objet et de l'autonomie de l'art, et la nature fétichiste de l'art bourgeois."[1]
Benjamin Buchloh, "Construire (l'histoire de) la sculpture moderne" in Qu'est-ce que la sculpture moderne ?, Musée national d'art moderne, Paris, 3 juillet-13 octobre 1986, Paris: Musée National d'Art Moderne, 1986, p. 262
[1] Boris Arvatov, Kunst und Produktion, Munich, 1972, p. 12.