Les objets, chez Laura Lamiel, ne signalent aucune intrusion euphorique de la vie dans l'œuvre d'art. Il y a dans leur présentation un dépouillement, une rigueur, une gravité même, qui en font les éléments d'un vocabulaire se prêtant, comme les signes de la logique mathématique, à toutes les combinaisons. Tout au plus proposent-ils un principe d'équivalence du réel et de l'art, non pas au sens où l'entendait Robert Filliou, dans une approche immédiate du problème de l'expression, mais comme prise de conscience d'une ambivalence provoquée lorsqu'on fait glisser l'objet d'un plan de signification à l'autre. Comme si une lente décantation avait peu à peu dégagé des matériaux disparates récoltés ainsi que des nombreux volumes usinés, les particules élémentaires d'un langage personnel. D'un langage préoccupé par la négociation et la renégociation de la limite entre deux mondes, intérieur et extérieur. Autant le dispositif des maisons donne le sentiment de se trouver confronté à l'objet architectural, autant les objets paraissent solidaires du corps périssable.

Anne Tronche, Laura Lamiel, La pensée du chat, Paris, éditions Actes sud / Crestet centre d'art, 2001, p. 47.