Au gré des choix qu'ils ont opérés depuis quelques années, on peut déceler une propension à produire ce que l'on pourrait appeler des ready-made assistés aux formes minimales. Chez eux, l'assistance au ready-made est souvent sa réduction jusqu'à l'épure, l'ablation des anecdotes et éléments contextuels, sans pour autant conduire à l'assèchement. C'est précisément là que réside le tour de force qui les singularise : leurs œuvres atteignent une sorte d'étymon à vocation universelle, susceptible d'incarner toutes les histoires singulières. L'objet reste alors ce qu'il était, tout en étant potentiellement tous les autres possibles. Le critique et commissaire d'exposition américain Jens Hoffmann a forgé le terme "minimalisme politique" pour désigner des œuvres à l'esthétique minimaliste aux échos sociopolitiques. On pourrait utiliser un autre oxymore pour définir le travail de Stéphanie Rollin et David Brognon : "minimalisme narratif" ; une forme dépouillée d'oripeaux localisables, capable dès lors d'endosser toutes les histoires, des micro-récits intimes aux archétypes narratifs universels.

Pierre-Olivier Rollin, Il faut les rendre immortels. Résilients ou les temps abolis in Brognon Rollin, L'avant-dernière version de la réalité, co-édition MAC VAL - BPS22, 2020, p. 81.