Après son baccalauréat, Beuys envisage des études de médecine. Puis, après la guerre, il se consacre très sérieusement à la recherche scientifique, avant de suivre l'enseignement artistique d'Ewald Mataré à l'Académie des Beaux-Arts de Düsseldorf. Son intérêt pour les sciences de la nature demeure, mais prend une forme différente. Beuys pense que le concept courant des sciences de la nature revêt un caractère purement analytique et se détourne du vivant par ses procédures abstraites, quantitatives et mathématisables : "On a tout réduit à la loi de la matière (…) En ce sens le matérialisme (…) a élaboré le principe de mort"[1]. En s'occupant de zoologie et de botanique, il est amené à appréhender de manière évolutive le développement de tous les vivants, les animaux et les plantes représentant des stades de développement conduisant à l'homme. Sous l'influence de Goethe, il en arrive à adopter une méthode comparative et morphologique des formes de la nature. Il reprend l'idée de Goethe sur la polarité, qui explique les métamorphoses des formes vivantes par le mouvement polaire des processus de concentration et d'expansion dans la nature. Ainsi, les processus naturels se soumettent à une totalité organique qui implique l'unité de l'homme et de la nature. L'histoire de l'homme est alors la prolongation organique et évolutive de l'histoire de la nature.

Max Reithmann, "Le langage : lieu du vivant", in Joseph Beuys, Par la présente, je n'appartiens plus à l'art, trad. Olivier Mannoni et Pierre Borasa, Paris, L'arche, 1988, p. 138-139.

[1] Joseph Beuys, in Soziale Plastik, Achberg 1984, p. 49.