Elle décida de rentrer avant la nuit il se trouva des enfants pour l'accompagner, eux-mêmes rentraient à Edgefront, les parents suivraient plus tard. Tout le long du chemin, ils tournoyaient autour d'elle, intensément joueurs, changeant sans arrêt d'allure, s'arrêtant de longs moments pour la rattraper ensuite, passant à travers les faisceaux de lumière dorée qui sabraient les bois, sifflant dans les zébrures qui les cachaient et les révélaient à la fois. Elle apercevait une tête, un bras, parfois une silhouette entière, elle les pointant du doigt, criant vu ! Quand ils s'éloignaient plus profondément, elle entendait encore leurs exclamations, sans bien savoir s'ils riaient ou s'insultaient, mais bientôt elle comprit de nouveau leur langage : leur langue indienne s'effaçaient à mesure qu'ils revenaient vers la ville et Summer admira cette manière qu'ils avaient d'être raccords au monde.
Maylis de Kerangal, Naissance d'un pont, Paris, Verticales Gallimard, 2010, p. 303.