En plus de dénoncer l'aliénation de l'ouvrier engendrée par l'industrie, Morris est poussé par un désir irréductible de modifier la société moderne par les conditions de production du travail en le rendant plaisant : "Nous pourrons alors agrémenter notre vie du plaisir d'acheter sans regret des marchandises au prix qui convient ; du plaisir aussi de vendre des marchandises de bonne qualité, quant au prix, quant au travail, fera notre fierté ; du plaisir enfin de travailler sans précipitation ni soin superficiel à la fabrication de produits dont nous pourrons être fiers. Ce dernier est le plus grand des trois, un plaisir tel que le monde, je crois, n'a nulle part son pareil1." Morris considère qu'une vie de travail d'où serait exclue la joie de la création équivaut à la fin de la civilisation et que le principal danger de l'industrialisation est la destruction non seulement de la beauté mais aussi de la vie.


Alexandra Midal, Design, introduction à l'histoire d'une discipline, 2009, Paris, Pocket Univers Poche, p. 58.

[1] William Morris, "Les arts mineurs" (1895) in Contre l'art d'élite/i>, Paris, Hermann, 1985, p. 27.